De ses inspirations à ses confessions sur l’amour et l’amitié, en passant par les questions de sexualité et de genre… Vogue Hommes a rencontré Xavier Dolan à l’occasion de la sortie de Matthias et Maxime.
Avec Matthias et Maxime, Xavier Dolan a voulu revenir à un cinéma plus intimiste. Deux amis d'enfance doivent s'embrasser pour les besoins d'un court métrage dirigé par la jeune Erika, la sœur d'un membre de leur groupe. Ce qu'ils ne savaient pas, c'est que ce baiser allait remettre en question leurs sentiments et bouleverser leur vie. Alors que Matthias et Maxime sort ce mercredi en salles, Xavier Dolan s'est confié en exclusivité à Vogue Hommes.
© Shayne Laverdiere
Bonjour Xavier ; "Matthias et Maxime" traite de la frontière entre amour et amitié, mais aussi d'une amitié que l'on pourrait qualifier d'amoureuse. D’où t’es venue l’inspiration ?
Xavier Dolan : C’est tout simplement l’histoire que j’avais envie de raconter. Une histoire entre amis, et plus particulièrement entre mes amis et moi. Même si ce qui est raconté dans le film n'est pas vraiment le reflet de nos vies.
Justement, était-ce important pour toi de faire ce film avec tes amis ?
J’ai toujours tourné avec des amis, ce n’est pas la première fois. Par exemple, dans Juste la fin du monde, je ne connaissais pas bien Marion (Cotillard), Gaspard (Ulliel) et Léa (Seydoux) mais je ressentais déjà de l’affection pour eux. Je suis quelqu’un d’affectueux, je montre facilement mon attachement aux personnes avec qui je travaille.
Et de le faire dans ton pays natal ?
Oui, j’avais vraiment besoin de le réaliser chez moi, au Québec. Était-ce l’idée de faire un film sur des amis qui m’a forcé à le faire avec eux ou était-ce le film avec mes amis qui m’a forcé à le faire au Québec ? Je ne peux pas l’expliquer. Je savais qu'en faisant le film chez moi, avec des amis, nous serions à l'aise,sur un terrain connu et que nous pouvions déjà travailler à un certain niveau, sans apprivoiser qui ou quoi que ce soit. C'était une grande longueur d'avance.
© Shayne Laverdiere
Qu’as-tu appris sur l’amitié en réalisant "Matthias et Maxime ?
La plus belle découverte pour moi, c'est la facilité avec laquelle mes amis se sont remis en question comme moi je le fais. Même si on déconnait souvent, on a su rester professionnel. On cherchait sans cesse à s’impressionner. De toute façon, on a toujours envie que l’autre nous trouve bon, inspirant, et vice versa. C'était vraiment le cas.
Quelle est la grande différence entre amour et amitié selon toi ?
Je suis presque amoureux de mes amis, sans aucune ambiguïté ou toxicité. Quand on y pense, la seule grande différence, c'est la sexualité. L'amitié, c'est de l'amour sans sexe.
© Shayne Laverdiere
Y a-t-il eu une scène plus intense qu'une autre à tourner ?
Non. Les plus difficiles, ce sont les petites scènes techniques qui sont souvent plus ardues à comprendre, notamment en terme de plan. Contrairement à ce que l'on peut penser, les scènes de rire ou de colère sont les plus simples et excitantes à tourner.
Parle-nous de l'esthétique du film…
La seule scène du film pensée en terme esthétique est aussi la plus romantique. Celle du baiser entre Matthias et Maxime derrière la baie vitrée, point culminant du film. Tout le reste est purement psychologique. J'ai voulu faire un film simplifié, caméra à l'épaule, qui épouse les mouvements des personnages, avec des décors réalistes, presque naturalistes.
Initialement, je ne voulais pas jouer dans le film. C'est un ami qui m'a convaincu.
Il y a un véritable choc des générations. Erika, la soeur de Rivette, qui demande à Matthias et Maxime de s'embrasser pour son court-métrage, semble tout à fait à l'aise avec ces questions identitaires…
Totalement. Quand j'ai terminé le lycée, à 17 ans, il n'y avait que les hétérosexuels, homosexuels, lesbiennes et bisexuels. La nouvelle génération est très ouverte sur les questions de sexualité et de genre. Si ça peut déconcerter certains personnes de mon âge, moi je trouve ça génial. Comment ne pourrais-je pas épouser le mouvement? Elle dépasse tous les blocages.
© Shayne Laverdiere
Pourquoi avoir choisi de camper le personnage de Maxime ?
Initialement, je ne voulais pas jouer dans le film. C'est un ami qui m'a convaincu. Il m'a prévenu que je regretterai si je ne le faisais pas et il aurait eu raison. Et puis j'ai envie de continuer de jouer, d'ailleurs c'est ce que je prévois de faire dans les prochaines années.
Si tu devais choisir un film de référence sur l'amitié, ce serait lequel ?
The Big Chill (Les Copains d'abord) de Lawrence Kasdan. C'est un groupe d'amis de lycée qui se retrouvent une vingtaine d'années plus tard pour un week-end à la campagne après le suicide d'un de leurs membres. Tous ont une vie stable et des carrières, mais ils se redécouvrent, réapprennent à se connaître… Un film magnifique qui m'inspire beaucoup.
Et un film sur l'amitié qui t'a inspiré pour Matthias et Maxime ?
Thelma et Louise, mais c'est un duo… Ah, celui qui m'a servi de référence c'est Will Hunting de Gus Van Sant, avec Matt Damon et Ben Affleck. La notion d'amitié est très importante dans ce film. Chacun s'insulte constamment mais en même temps se protège.
© Shayne Laverdiere
Dernière question… Qu'as-tu fait de plus fou par amitié ?
Rien ne me paraît fou en amitié, jamais en comparaison de ce que j'ai pu faire par amour.
Et par amour alors ?
C'est quelque chose qui m'appartient… Tout ce que je peux dire c'est que je suis allé très loin.
"Matthias et Maxime" de Xavier Dolan, en salles le 16 octobre
Source: Lire L’Article Complet