À Londres, la Fashion Week veut s’ouvrir à (presque) tout le monde

Les 14 et 15 septembre dernier, la Fashion Week londonienne inaugurait son nouveau projet donnant au grand public un accès privilégié à certains de ses défilés. On y était.

C’est dans l’espace officiel du BFC (British Fashion Council) avenue Strand à Londres que se tenait ce week-end la première d’un événement particulier. En file d’attente, des personnes de tout âge attendent impatiemment d’entrer, tenant à la main leur précieux sésame. Ce week-end-là, ils ont revêtu leurs plus beaux atours afin d’assister, pour nombre d’entre eux, à leur premier défilé de mode.

La mode londonienne se démocratise

C’est la première fois que dans l’une des capitales de la mode occidentale se tient ce type d’événement. Juillet dernier, le BFC annonçait qu’il présenterait ses premiers défilés accessibles au public en septembre. Des entrées payantes – pour ceux prêts à mettre le prix – ouvrent ainsi les portes des défilés de certaines marques. 

Le BFC a toujours été un leader en terme d’innovation.

« Le public pourra acheter un billet pour une expérience immersive de la Fashion Week de Londres. Celui-ci couvre une sélection de designers présentant six défilés qui se déroulent dans le hub officiel de la Fashion Week de Londres, les samedi 14 et dimanche 15 septembre 2019, des installations créatives, des panels de discussion animés par des experts offrant des perspectives inégalées sur le secteur de la mode, le DiscoveryLAB, un espace expérimentale où la mode, l’art et la musique se rencontrent, et une toute nouvelle exposition de créateurs, à travers laquelle le travail créatif de designers progressistes explore des histoires sur la durabilité, la communauté et l’éthique ».

« Le BFC a toujours été un leader en terme d’innovation. Nous avons par exemple été les premiers à permettre une retransmission digitale de la Fashion Week. Aujourd’hui, la mode appartient au monde culturel, on s’est dit qu’il fallait créer des expériences et éduquer le grand public tout en donnant de la visibilité à la jeune création. Cette ouverture permet aussi d’inclure des consommateurs de luxe», nous explique par téléphone Stéphanie Phair, directrice du BFC depuis juillet 2018.

Un public conquis

Ce samedi 14 septembre 2019, nous assistons donc à un moment majeur. Malgré tout, des consœurs s’inquiètent de ce que cette ouverture signifie en matière de mode. Est-ce que permettre à tout le monde d’accéder aux défilés ne va pas encore plus tuer la presse mode ? 

Premier show à être présenté lors de ce week-end, celui d’Alexa Chung. It-girl des années 2 000 reconvertie en designer à succès, elle présentait ce jour-là sa collection déjà disponible en boutique. Le BFC a effectivement opté pour un défilé « See Now Buy Now » (voir et acheter maintenant )pour permettre au public de pouvoir aller acheter ses pièces favorites sur place, directement après le show. 

Leur téléphone ou un appareil photo numérique greffé à la main, des robes du soir à la traîne longue, des hommes en costumes, des femmes ayant sorti de leurs armoires leurs pièces fétiches de designers comme une ceinture Gucci ou une robe Rotate… C’est une faune assez touchante qui attend avec impatience la brève extinction des lumières signalant le début du défilé. Le silence devient total lorsque marche sur le podium le premier mannequin. Les yeux suivent la silhouette sans la lâcher, les smartphones se lèvent au-dessus des têtes. Tout le monde est fasciné et retient son souffle. Au premier rang, accessible pour 245£, soit 276€, certaines gardent leurs lunettes de soleil et font la moue, pensant sans doute imiter le visage des rédactrices habituées à ces évènements. 

Lorsque le show s’achève, les yeux brillent encore d’émotions malgré l’absence des designers. Derrière nous, un garçon qui ne doit pas avoir plus de 22 ans répond aux questions d’une journaliste. Il a payé 165 £ (185 €) pour sa place et il est ravi d’avoir pu assister à ce cérémoniel mode. À ses côtés, Assma, 25 ans. Ils ne se connaissent pas et pourtant, ils avaient le même rêve. Elle explique : « Mes amis m’ont offert la place pour mon anniversaire, pensant me faire plaisir. C’est quelque chose de voir débarquer les mannequins sur le podium. J’ai l’habitude de regarder les images des défilés sur mon téléphone, mais là… Ça rend la chose plus réelle ». Quand on lui demande si elle serait prête à réitérer l’expérience elle répond oui sans attendre. Rien d’étonnant puisque les 6 sessions étalées sur le week-end étaient toutes sold-out. Dans la file d’attente menant au talk qui suit le défilé, une jeune fille raconte à son amie comment elle a failli appeler son père le matin même pour lui raconter à quel point elle était excitée à l’idée d’assister à son premier défilé. « Je ne tenais plus en place, mais je me suis dit que je l’appellerais plutôt après », s’enthousiasme-t-elle.

« On attend encore les chiffres officiels », me prévient quant à elle Stephanie Phair, « mais on a accueilli plus de 2 000 personnes ce week-end. Les gens de la presse sont aussi venus, curieux d’assister à la première du projet ». Et quand on lui demande si le BFC compte renouveler l’opération, elle répond sans hésiter par l’affirmative. « Nous sommes déjà en discussion avec des designers pour la Fashion Week de février prochain. Notre but est de nous démarquer, d’être plus inclusif et surtout de promouvoir la mode contemporaine ».  

Anciennement industrie élitiste, la mode subit de nombreux chamboulement depuis qu’elle est devenue mainstream. Et, si les places restent chères, il n’empêche que la Fashion Week de Londres est en train de changer le visage de la mode telle que nous la connaissons.

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